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[Dossier Salariés des TPE] Un soutien crucial dans les moments durs

Publié le 19/12/2020

Difficile de se défendre seul quand un conflit éclate avec son employeur. Pour accompagner les salariés des TPE, des militants CFDT ne comptent pas leur temps. Récit de deux combats parmi tant d’autres…

Alvyne

«C’était une galère trop grosse pour moi. Il n’y avait pas moyen que je gère ça tout seul. Sans la CFDT, je ne sais pas comment j’aurais fait. »

Quand Alvyne nous raconte son histoire et celle de ses déboires avec son employeur véreux, il a heureusement repris du poil de la bête, retrouvé un travail et un équilibre. Son visage rayonne même en nous montrant des photos de sa fille née quelques jours plus tôt.

Nous sommes à la fin octobre. Mais, en mars dernier, il a bien failli perdre pied. Employé comme « chef d’équipe mécanicien » pour une toute petite entreprise sous-traitante de Bird (location de trottinettes électriques), en CDI, il constate fin mars qu’il n’a pas reçu son salaire.

Là, j’ai paniqué. Comment j’allais faire pour payer mon loyer ? Avec ma femme, qui était enceinte […]

À la mi-avril, l’employeur le prévient par message WhatsApp que les neuf salariés (deux à Lyon et le reste de l’équipe à Marseille) sont mis en chômage technique. Un courrier suit quelques jours plus tard, expliquant les difficultés financières que traverse l’entreprise. Il contient une convocation à un entretien préalable à son licenciement économique. « Là, j’ai paniqué. Comment j’allais faire pour payer mon loyer ? Avec ma femme, qui était enceinte, et mes quatre enfants, on vit sur mon seul salaire. Alors j’ai appelé plein de gens, l’inspection du travail, etc. La CFDT a été la plus réactive. Très rapidement, on s’est occupé de moi. »

Alvyne AIacconiplumestudioLe conseiller du salarié qui suit son dossier relève d’ailleurs de nombreuses irrégularités sur son contrat de travail ainsi que sur ses bulletins de salaire. À cette occasion, il s’aperçoit que le patron ne payait pas ce qu’il devait mais se mettait dans la poche une partie de ce que versait l’entreprise donneuse d’ordre (Bird).

Excédé de voir que son chef traîne à le payer, Alvyne s’emporte et le traite d’escroc, ce dont il s’excusera rapidement. Mais l’employeur le prend au mot et lui inflige une mise à pied conservatoire. Le soutien de la CFDT est alors déterminant pour traverser cette période.

« À cette époque, j’avais du mal à me lever, je n’avais plus envie de rien. J’avais pris un sacré coup de massue », confie Alvyne. La CFDT l’accompagne pour engager une action en référé (procédure d’urgence) devant le conseil de prud’hommes… qui rend une décision en sa faveur, à la mi-août. « Le problème, désormais, c’est de faire appliquer la décision, car l’employeur a disparu dans la nature sans laisser de traces. On a découvert qu’il n’avait même pas d’autres comptes qu’un Nickel. »

Mais le fait d’avoir eu gain de cause a redonné confiance au jeune homme. « Déjà, qu’on ait reconnu l’injustice qui m’a été faite, c’est beaucoup. » Cela a été essentiel pour rebondir. Alvyne a désormais retrouvé un travail, un emploi de coursier en intérim. Ce jeune trentenaire est un nouvel adhérent dont on pressent la fibre militante, et chez qui cette épreuve a conforté l’envie de participer à défendre les droits des travailleurs.

Raymond

Raymond (le prénom a été changé) partage la conviction que seul on n’y arrive pas. Et d’ajouter : « Je ne me serais jamais lancé dans une bataille pareille ». À entendre son récit aux rebondissements aussi nombreux qu’éprouvants, et qui se poursuit aux prud’hommes depuis plusieurs années maintenant, on le croit sans difficulté.

La cinquantaine élégante, Raymond est brancardier dans le service des urgences d’un hôpital privé de la région lyonnaise. Ses soucis proviennent de son activité complémentaire d’homme de ménage, et de deux employeurs successifs qu’il a eus entre les années 2008 et 2017.

Pour le premier, il effectue une centaine d’heures par mois. S’il est payé régulièrement, la situation tourne au vinaigre quand il refuse d’exécuter davantage d’heures, comme son patron le lui demande. « Il voulait que je remplace une femme de ménage qui était en arrêt maladie. Mais c’était hors de question, j’avais tout mon travail à l’hôpital et je tirais déjà sur la corde. » L’employeur s’en irrite.

L’affaire aurait pu en rester là, d’autant que ce patron a décidé de céder l’entreprise. Mais lors de l’entretien avec les nouveaux repreneurs, il explose, profère des insultes homophobes et menace Raymond de lui « péter les genoux ». Sous le choc et traumatisé, ce dernier dépose une main courante au commissariat.

Avec les nouveaux patrons, les soucis continuent : retard dans le paiement des salaires, pression pour qu’il démissionne, refus d’accepter une rupture conventionnelle sur la base du nombre d’heures réellement effectuées, accusation d’avoir « détourné des clients » à son profit, entre autres menaces…

« Heureusement, à la CFDT, j’ai toujours trouvé l’interlocuteur et le soutien pour traverser tout ça sans couler. Pour l’entretien préalable au licenciement*, j’avais été bien préparé et prévenu des risques d’intimidation de la part de l’employeur. Sans cela, ça aurait été effroyable. » D’ailleurs, quand Raymond leur annonce qu’il va venir accompagné par la CFDT à l’entretien préalable à son licenciement*, le patron et son équipe décident de décaler le rendez-vous. Au second rendez-vous, ils sont venus avec un avocat. Son affaire aurait dû être jugée en mars mais, reportée du fait du confinement, elle le sera sans doute au début de 2021. D’ici là, Raymond sait qu’il peut compter sur la CFDT.           

* Raymond a désormais quitté l’entreprise.

epirat@cfdt.fr

©Photo Teresa Suarez – Alexandre Iacconi