Vote électronique : votre employeur doit s’assurer que tous les salariés de l’entreprise puissent voter

Publié le 22/06/2022

Un employeur interdisant à certains salariés à distance, qui rencontraient des difficultés à se connecter à la plateforme de vote, d’utiliser un ordinateur de l’entreprise ou personnel pour l’exercice de leur droit de vote porte atteinte au principe d’égalité. Il devait s’assurer que tous les salariés pouvaient bien voter. C’est ce que décide la Cour de cassation dans un arrêt du 01.06.2022 en validant l’annulation des élections. Cass. Soc. 01.06.2022, n°20-22.860

L’interdiction d’utiliser certains matériels pour l’exercice du droit de vote

Dans cette affaire, la délégation du personnel au CSE était élue par vote électronique. L’employeur a été alerté des difficultés de certains salariés à se connecter sur la plateforme de vote durant la période d’ouverture du vote. Cela concernait spécifiquement des salariés ne disposant d’aucun bureau ou de poste de travail dans les locaux de l’entreprise. Pour des raisons de confidentialité, l’employeur leur a interdit toute utilisation d’un ordinateur de l’entreprise ou d’un ordinateur personnel au sein de l’entreprise.

Des syndicats saisissent alors le juge judiciaire pour faire annuler ces élections, estimant que ces salariés ont été écartés du vote. Celui-ci leur donne raison.

La Cour de cassation est saisie par l’employeur et confirme cette annulation.

Le nécessaire respect du droit électoral

Les juges se fondent sur l’article L. 2314-26 du Code du travail qui dispose que l’élection peut avoir lieu par vote électronique si un accord d’entreprise, ou à défaut l’employeur, le décide. 
Selon l’article L. 2314-27, l’élection a lieu pendant le temps de travail mais un accord contraire peut être conclu entre l’employeur et l’ensemble des OS représentatives dans l’entreprise.

Ils s'appuient également sur un arrêt du 3 octobre 2018 (Cass.soc. 03.10.2018 n°17-29.022) affirmant que :

Le recours au vote électronique ne permet pas de déroger aux principes généraux du droit électoral.

Sont également cités, les articles R. 2314-5 et R. 2314-6 du Code du travail. Le premier dispose que l’élection peut être réalisée par vote électronique sur le lieu de travail ou à distance.

Le second dispose que « Le système retenu assure la confidentialité des données transmises, notamment de celles des fichiers constitués pour établir les listes électorales des collèges électoraux, ainsi que la sécurité de l'adressage des moyens d'authentification, de l'émargement, de l'enregistrement et du dépouillement des votes. ».

Une violation du principe d’égalité devant l’exercice du droit de vote

Enfin la Cour de cassation approuve le raisonnement des juges du fond.

L’employeur aurait dû s’assurer que l’ensemble des salariés avaient accès à un matériel permettant d’exercer leur droit de vote. Il ne pouvait donc pas interdire l’utilisation de certains matériels de vote sans avoir cette assurance que tous pouvaient voter.

Ici, l’employeur ne justifiait pas de ce qui l’empêchait de mettre en place des procédés visant à pallier les problèmes d’accès de certains salariés. La Cour cite en exemple la mise en place de terminaux dédiés au vote électronique dans les établissements de l’entreprise.

Les juges estiment ensuite que « le tribunal en a déduit que la société n'avait pas pris les précautions appropriées pour que ne soit écartée du scrutin aucune personne ne disposant pas du matériel nécessaire ou résidant dans une zone non desservie par internet, ce dont il résultait une atteinte au principe général d'égalité face à l'exercice du droit de vote ».

Cette atteinte justifie à elle seule l’annulation du scrutin, quel que soit son incidence sur le résultat.

La solution est protectrice de l’exercice du droit de vote par les salariés. Le manquement au principe d’égalité est logiquement retenue dès lors que certains salariés sont empêchés d’exercer ce droit par l’employeur.

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