Clause de non-concurrence : son renouvellement doit être exprès !

Publié le 19/10/2022

On le sait, pour être valable, une clause de non-concurrence doit notamment être limitée dans le temps. Mais il arrive que le contrat de travail, ou la convention collective, prévoit la possibilité de renouveler la durée d’application de la clause initialement prévue. Dans ce cas, l’employeur qui souhaite le faire doit agir de manière expresse ! Faute de quoi le salarié ne sera plus tenu par cette clause de non-concurrence, et la contrepartie financière qui lui était jusqu’ici versée en retour du respect de la clause, cessera de l’être. Cass.soc.21.09.22, n°20.18.511.

Une clause de non-concurrence renouvelable

Dans son contrat de travail, un salarié signe une clause de non-concurrence d’une durée limitée (1 an), renouvelable une fois. Ce qui veut dire que si le contrat est rompu, le salarié ne pourra travailler chez un autre employeur dont l’activité pourrait nuire à son précédent employeur pendant une durée d’1 an, voire de 2 ans si la clause était renouvelée. Cette clause s’accompagne toujours d’une contrepartie financière pour le salarié, en raison de la contrainte qu’elle engendre pour lui dans sa future recherche d’emploi.

Il s’agit ici de la CCN des ingénieurs et cadres de la métallurgie, qui prévoit que la clause de non-concurrence a une validité d’1 an, renouvelable 1 fois.
Dans cette CCN, il est également précisé que l’employeur a la possibilité de dénoncer cette clause et de se décharger de l’indemnité qui y est liée, à condition de prévenir le salarié par écrit dans les 8 jours suivant la notification de la rupture du contrat.

Au bout d’1 an, l’employeur a cessé de verser au salarié l’indemnité découlant de la clause de non-concurrence, sans toutefois dire expressément qu’il ne souhaitait pas la renouveler.

Pour le salarié, la clause continuait à s’appliquer et la contrepartie financière qui en découlait devait donc lui être versée. Il décide d’agir en justice.

Les juges du fond vont donner raison au salarié. La non-renonciation expresse du bénéfice de cette clause par l’employeur avait pu créer une ambiguïté pour le salarié. Il pouvait en effet penser que la clause perdurait et que l’indemnité lui était due pour la 2é année :  « l’interdiction de concurrence d’une durée d’un an n’a certes pas été renouvelée, mais que la dénonciation de l’interdiction de concurrence étant prévue en 1 fois, dans les 8 jours suivant la notification de la rupture du contrat, le salarié a pu croire à défaut de dénonciation expresse et claire, eu égard à l’ambiguïté née de l’emploi du terme renouvelable qu’il restait tenu du respect de la clause pendant encore une année à l’expiration des 12 premiers mois ».

L’employeur forme un pourvoi en cassation.

La clause de non-concurrence renouvelable mais non renouvelée peut-elle être tacitement reconduite lorsque l’employeur n’a manifesté ni son envie de la renouveler, ni d’y mettre un terme ?
La contrepartie financière qui en découle doit-elle être versée au salarié ?

 

La clause doit être expressément renouvelée

Pour la Cour de cassation, il est clair que non ! La Haute Cour rappelle qu’une clause de non-concurrence ne peut pas être tacitement reconduite : il faut qu'elle soit expressément renouvelée.

En statuant comme l’a fait, alors que le contrat du salarié stipulait que « la durée de cette interdiction de concurrence sera d’1 an, renouvelable 1 fois » et qu’elle avait constaté son non-renouvellement, la Cour d'appel a dénaturé l’écrit qui lui avait été soumis. 

Confirmation de la jurisprudence antérieure

Dans un arrêt du 7 mars 2018 (1) (il s’agissait de la même CCN), la Cour de cassation avait déjà jugé qu’en présence d’une clause de non-concurrence renouvelable, le renouvellement ne pouvait être ni automatique, ni tacite.

La Haute Cour reproche alors aux juges du fond :

- d’avoir retenu que l’employeur n’a pas libéré officiellement le salarié de la clause de non-concurrence "par un acte positif " alors que les parties avaient convenu d'une clause de non-concurrence valable 1 an et renouvelable une fois ;

- et de ne pas avoir constaté son renouvellement. 

Un autre apport dans cet arrêt : le licenciement économique peut se justifier sans baisse du chiffre d'affaires!

 Dans son premier moyen cette fois , la Cour de cassation apporte une précision importante.

Le rôle du juge dans l’appréciation des indicateurs introduits dans le Code du travail (2) par la loi dite « Travail » de 2016.

Nous y reviendrons dans une prochaine actu. 

 

(1) Cass.soc.07.03.18, n°16-23.705.

(2) Art. L.1233-3 1° C.trav.

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