Retour

Le contrat de travail temporaire

Publié le 17/09/2020

Le contrat de travail à durée indéterminée est la norme de la relation de travail. Toutefois, dans certains cas, l’employeur peut avoir recours à des contrats de travail précaires, dont le contrat de travail travail temporaire.

Définition 

Le travail temporaire (également dénommé « intérim » dans le langage courant) n’est pas défini par la loi.

L'entrepreneur de travail temporaire, c’est-à-dire l’entreprise de travail temporaire (ETT), est défini comme toute personne physique ou morale dont l'activité exclusive est de mettre temporairement à la disposition d'entreprises utilisatrices des salariés recrutés et rémunérés à cet effet.

Le recours au travail temporaire a donc pour objet la mise à disposition d'un salarié par une ETT au profit d'une autre entreprise, dite « utilisatrice », pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire dénommée « mission ».

Ainsi, le travail temporaire constitue une relation triangulaire entre l'employeur (ETT), le salarié en mission et l'entreprise utilisatrice. Si juridiquement l’ETT est l’employeur (elle recrute et paye le salarié temporaire), c’est l’entreprise utilisatrice qui, durant la mission, exerce les pouvoirs de direction et de contrôle sur le salarié.

La loi Avenir professionnel du 5 septembre 2018 a ouvert la possibilité d'expérimenter la création d'entreprises de travail temporaire adaptées afin de favoriser l'accompagnement des personnes en situation de handicap vers des employeurs publics ou privés.

 

Cas de recours

Le recours au contrat de travail temporaire doit avoir un caractère exceptionnel. Le contrat de mission est limitée à l’exécution d'une tâche précise et temporaire et ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise utilisatrice, quel que soit son motif.

La loi énumère de façon limitative les cas ouvrant droit à des missions de travail temporaire d’un salarié intérimaire :

- En cas de remplacement d'un salarié ou remplacement d'un dirigeant d'entreprise

Le remplacement du salarié peut être motivé par son absence ou la suspension du contrat de travail, notamment en cas de congés payés ou maternité, d’absence du poste de travail en fonction d’affectation sur un autre poste, en raison de maladie ou accident, de passage provisoire à temps partiel d’un salarié permanent, de départ définitif du salarié précédant la suppression du poste ou encore de l’attente de l’entrée en service d’un salarié recruté en CDI.

- En cas d’accroissement temporaire d'activité ;

L’accroissement temporaire de l’activité peut être lié aux variations cycliques de production augmentant de volume d’activité de l’entreprise, ne pouvant toutefois pas entrer dans son rythme normal et permanent.

- En cas d’emploi à caractère temporaire ;

Les emplois à caractère temporaire comportent notamment les travaux saisonniers et les travaux temporaires par usage ou définis par convention ou accord collectif, concernant certaines activités comme l’exploitations forestières, la réparation navale, le sport professionnel, l’enseignement, les spectacles entre autres.

- En cas de complément de formation professionnelle, embauche de personnes rencontrant des difficultés sociales et professionnelles et apprentissage.

La loi prévoit certaines situations dans lesquelles un travailleur temporaire peut être mis à disposition d’une entreprise utilisatrice, visant à favoriser le recrutement de personnes sans emploi rencontrant des difficultés sociales et professionnelles particulières et à améliorer la formation professionnelle du salarié concerné.

 

 Du 1er janvier 2019 au 31 décembre 2021, la mise à disposition d'un salarié temporaire auprès d'une entreprise utilisatrice peut intervenir en dehors des "missions" prévues par la loi, lorsque ce salarié temporaire est un bénéficiaire de l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés. La qualité de travailleur handicapé suffit à justifier le recours au contrat de travail temporaire, n'étant pas nécessaire que le contrat entre dans les cas de recours classiques à l'intérim.

 

Interdictions

Le recours au travail temporaire est interdit dans les situations suivantes :

- Pour le remplacement de salariés grévistes ;

- Pour accroissement temporaire d’activité dans les 6 mois suivant un licenciement économique ;

- Pour effectuer des travaux particulièrement dangereux ;

- Pour remplacer le médecin du travail ;

- Pour employer des travailleurs étrangers pour une prestation à l’étranger.

 

La forme et le contenu

La relation triangulaire établie entre le travailleur intérimaire, l’ETT et l’entreprise utilisatrice comprend deux types de contrat :

- Un contrat de travail dénommé « contrat de mission », conclu entre le travailleur intérimaire et l'ETT ;

- Un contrat dit « contrat de mise à disposition », conclu entre l'ETT et l'entreprise utilisatrice (client).

 

  • Le contrat de mission

Un contrat de travail entre l'intérimaire et l'ETT doit être établi par écrit et signé, sous peine de nullité ou de requalification en CDI.

Le contrat de mission doit contenir certaines clauses obligatoires, comportant notamment :

- Mentions obligatoires du contrat de mission

- Reproduction des clauses figurant au contrat de mise à disposition

- Qualification du salarié temporaire

- Modalités de la rémunération et indemnité de fin de mission

- Conditions d'exécution de la période d'essai si prévue par les parties.

- Coordonnées des organismes de retraite complémentaire et prévoyance dont relève l'entreprise de travail temporaire

- Clause relative à l'embauche en fin de mission

A défaut d'accord collectif, la période d’essai a une durée maximale de :

- 2 jours pour un contrat de durée inférieure ou égale à 1 mois ;

- 3 jours pour un contrat d'une durée comprise entre 1 et 2 mois ;

- 5 jours au-delà.

 

  • Le contrat de mise à disposition

Un contrat de mise à disposition doit être fait par écrit, pour chaque salarié temporaire, au plus tard dans les 2 jours ouvrables suivant la mise à disposition. Le CSE peut prendre connaissance du contrat de mise à disposition.

Il doit comporter un certain nombre de mentions obligatoires, comme le motif pour lequel il est fait appel au salarié temporaire; le terme de la mission; les caractéristiques particulières du poste de travail à pourvoir ; la qualification professionnelle exigée, lieu de la mission et horaire ; le montant de la rémunération.

Il est interdit de prévoir une clause tendant à empêcher l'embauchage du salarié temporaire par l'entreprise utilisatrice. 

La durée et le renouvellement du travail temporaire

En principe, les contrats de travail temporaire doivent comporter un terme fixé avec précision dès leur conclusion. On parle de contrat « de date à date » (ex : du 1er février au 30 avril).

Depuis l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, les branches peuvent négocier certaines dispositions encadrant le recours à l'intérim (durée maximale, fixation du nombre de renouvellements possibles, successions de CDD ou de contrats de mission sur le même poste). Mais les adaptations autorisées par ce texte sont subordonnées à la conclusion d'une convention ou d'un accord de branche étendu.

En l’absence d’accord de branche étendu, la durée maximale des contrats d’intérim est en principe de 18 mois, renouvellement inclus.

Le travail temporaire peut toutefois être conclu sans terme précis quand il est a priori difficile de déterminer la date exacte où la mission prendra fin (notamment en cas de remplacement d’un salarié absent, d’un chef d’entreprise, de contrat saisonnier, d’attente d’un recrutement). Le contrat doit alors être conclu pour une durée minimale : il prend fin soit lorsque l’objet pour lequel il a été conclu a été réalisé (ex. : retour du salarié absent, fin de la saison), soit au terme de la durée minimale si l’objet pour lequel il a été conclu a été réalisé avant.

En l’absence de dispositions conventionnelles, le contrat de mission est renouvelable deux fois pour une durée déterminée qui ne peut excéder la durée maximale prévue par accord de branche étendu ou par la loi. 

Les absences au cours du contrat

En cas d’absence du salarié remplaçant notamment pour maladie, accident du travail, congé maternité etc. la durée du contrat n’est pas pour autant prolongée, celui-ci se termine à l’échéance prévue initialement. Le terme peut donc potentiellement intervenir pendant l’absence du salarié.

Le contrat de mission peut être suspendu dans les mêmes conditions qu'un contrat à durée indéterminée (maladie, maternité, accidents du travail).

  

La succession de contrats

À l’expiration d’un contrat de mission, le poste du salarié temporaire dont le contrat a pris fin ne peut pas être remplacé par un autre contrat de mission ni par un CDD qu’après un certain délai, dit « délai de carence » calculé en fonction de la durée du contrat de mission, renouvellement inclus.

Une convention ou un accord de branche étendu applicable dans l’entreprise utilisatrice peut fixer les modalités de calcul de ce délai de carence. Il faut distinguer selon que les contrats successifs ont ou non le même objet :

À défaut de stipulations conventionnelles ce délai est égal :

- à 1/3 de la durée du contrat initial, renouvellement inclus, si la durée de ce contrat est au moins égale à 14 jours ;

- à la moitié de la durée du contrat initial, renouvellement inclus, si la durée de ce contrat, est inférieure à 14 jours.

De la même façon, l’entreprise utilisatrice ne peut conserver un même intérimaire pour une autre mission sans respecter le délai de carence cité ci-dessus.

Une convention ou un accord de branche étendu peut prévoir les cas dans lesquels le délai de carence n’est pas applicable, à défaut d’accord, la règle du délai de carence ne joue pas dans les cas suivants :

-       Nouvelle absence du salarié absent ;

-       Travaux urgents pour remédier à une situation dangereuse ;

-       Emplois saisonniers ;

-       Emplois d’usage ;

-       Rupture anticipée du contrat à l’initiative du salarié ;

-       Remplacement d’un chef d’entreprise ou chef d’exploitation agricole.

La conclusion de contrat de missions successifs sans interruption, avec le même salarié, n’est possible qu’en cas de remplacement d’un salarié absent, pour les emplois saisonniers ou pour les contrats d’usage. En dehors de ces cas, des contrats ne pourront se succéder qu’à la condition de respecter un certain délai, on parle de délai raisonnable.

 

La rupture du contrat

  • La rupture anticipée

Le contrat de mission ne peut être rompu avant son terme que pour faute grave du salarié ou force majeure.

L’entreprise de travail temporaire qui rompt le contrat avant le terme prévu est tenue (sauf faute grave de l’intéressé ou cas de force majeure) de proposer à l’intérimaire un nouveau contrat équivalent dans un délai maximum de 3 jours ouvrables (rémunérés). À défaut, le salarié a droit à une rémunération correspondant à celle qu’il aurait perçue jusqu’au terme du contrat.

Le salarié ne peut, de sa propre initiative, rompre par anticipation son contrat de travail temporaire, sauf s’il peut justifier d’une embauche en CDI et sous réserve de respecter un préavis qui peut être réduit ou supprimé par accord des parties.

Hormis ce cas, le salarié qui rompt le contrat avant la fin de la mission s’expose à devoir verser à l’entreprise de travail temporaire des dommages-intérêts en réparation du préjudice. 

  • La rupture au terme du contrat

Sauf s’il a été rompu avant, le contrat de travail temporaire cesse à l’arrivée du terme prévu. L’intérimaire a alors droit à :

-  L’indemnité de précarité, destinée à compenser la précarité de sa situation, qui doit être égale au moins à 10 % de sa rémunération totale brute. Cette indemnité n’est toutefois pas due dans certains cas (notamment l’emploi saisonnier, le contrat d’usage, l’embauche immédiate de l’intérimaire par l’utilisateur, la rupture anticipée du fait du salarié, la rupture pour faute grave du salarié

-L’indemnité compensatrice de congés payés, correspondant aux congés payés qu’il a acquis et qu’il n’a pas eu le temps de prendre. Elle ne peut être inférieure au 1/10 de la rémunération totale brute due (indemnité de précarité comprise) s’il n’a pu prendre aucun congé.

A l’issue du contrat, l’employeur doit remettre au salarié une attestation Pôle emploi et un certificat de travail.

 

La sanction au recours abusif au travail temporaire

  • La requalification du contrat de mission en CDI

En cas de violation des règles régissant le recours au travail temporaire (notamment si le contrat ne comporte pas le motif pour lequel il est conclu, ou si le motif ne figure pas dans les cas de recours autorisés ou en cas de non-respect de la durée maximale autorisée) le salarié peut demander auprès de l’entreprise utilisatrice ou du juge la requalification de son contrat de mission en contrat à durée indéterminée (CDI).

Le contrat est réputé être à durée indéterminée si l'entreprise utilisatrice continue à faire travailler un salarié temporaire après la fin de sa mission sans avoir conclu avec lui un contrat de travail ou sans nouveau contrat de mise à disposition.

Il s’agit d’une sanction civile particulière, dite « requalification-sanction », qui n’est pas sans conséquence.

  • La procédure de requalification

La demande de requalification-sanction est portée directement devant le bureau de jugement du CPH selon une procédure accélérée, ayant 1 mois pour rendre sa décision. Seuls les salariés concernés et les organisations syndicales représentatives sont admis à demander la requalification du contrat de mission. Le salarié intérimaire souhaitant la requalification de son contrat en CDI peut recourir à la saisine du juge compétant pendant l'exécution du contrat ou après le terme de celui-ci.

  • Les effets de la requalification

Si la décision du CPH est favorable au salarié, requalifiant le contrat de travail temporaire en CDI, le salarié requalifié a droit à une indemnité au moins égale à un mois de salaire.

Si le contrat a été rompu : la requalification prononcée par le juge entraine la requalification de la rupture elle-même. La rupture du contrat est donc irrégulière et injustifiée, étant soumise aux règles applicables au licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Si le contrat n’a pas été rompu : il se poursuit en CDI. Le contrat est réputé à durée indéterminée depuis sa conclusion et l'ancienneté du salarié se calcule donc depuis la conclusion du contrat.

Ainsi, l'employeur a l'obligation de fournir du travail au salarié resté à son service dès lors que celui-ci n'a pas rompu le contrat à l'occasion de sa requalification. Si le salarié a perçu l'indemnité de précarité, celle-ci reste acquise au salarié lorsqu'il y a requalification.

Lorsqu'une succession de contrats de mission séparés par des périodes d'interruption est requalifiée en CDI, le salarié peut prétendre à des rappels de salaires pour ces périodes intermédiaires dès lors qu'il s'est tenu à la disposition de son employeur en vue d'effectuer un travail.

 

Pour aller plus loin :

Art. L. 1251-1 et suivants du Code du travail : le travail temporaire
Art. L. 1251-5 et suivants du Code du travail : les cas de recours
Art. L. 1251-42 et suivants du Code du travail : contrat de mise à disposition
Loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 : loi Avenir professionnel