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Le recrutement

Publié le 17/09/2020 (mis à jour le 03/07/2023)

Qu’il soit effectué directement par l’entreprise ou par le biais d’un cabinet, le recrutement d’un salarié relève du libre choix de l’employeur. Toutefois, celui-ci est soumis à des règles visant à protéger les droits fondamentaux du salarié. 

Le principe : la liberté de choix de l’employeur

L’employeur peut recruter le candidat de son choix, avec les techniques de recrutement qu’il souhaite.

Des règles subordonnent la liberté de l’employeur quant au choix du candidat à recruter, puisqu’il ne peut embaucher certaines catégories de travailleur, il doit parfois embaucher en priorité ou réembaucher certains salariés. Plus encore, la CNIL encadre strictement la nature et la gestion des données recueillies sur le candidat.

Enfin, le principe d’interdiction des discriminations prend toute sa place dans le recrutement, puisque même au stade pré-contractuel, l’employeur ne peut arrêter ses décisions sur un motif discriminatoire.

Votre employeur a signé une promesse de contrat qui précise le poste que vous occuperez et la date de votre entrée en fonction ? Si oui, cela vaut contrat de travail : en définitive, s'il ne vous embauche pas vous pouvez demander des dommages et intérêts au conseil de prud’hommes pour licenciement injustifié ! 

Interdiction ou limite à l'embauche de certaines catégories de travailleurs

Tenant à l’âge :

Il est en principe interdit d’embaucher des jeunes de moins de 16 ans non libérés de l’obligation scolaire (1).

Par ailleurs, le Code du travail établit la liste de l’ensemble des travaux interdits aux salariés de moins de 18 ans en raison du danger qu’ils présentent (2).

Tenant à l’état de santé :

L’employeur a l’interdiction de faire travailler une personne déclarée inapte à son poste de travail par le médecin du travail, cela ne constitue pas une discrimination (3).

Il a également l’obligation d’adapter le poste du salarié déclaré partiellement inapte selon les prescriptions du médecin du travail.

Tenant à la nationalité étrangère :

Il existe une interdiction pour l’employeur d’embaucher des personnes qui ne sont pas citoyennes de l’Union Européenne et non titulaires d’une autorisation de travailler en France (4).

 Nature des données recueillies sur le candidat

Lors d’un recrutement, les informations qui peuvent vous être demandées doivent avoir un lien direct et nécessaire :

- avec l’emploi proposé,

- avec l’évaluation de vos aptitudes pour ce poste.

Si vous avez l’obligation de répondre de bonne foi aux questions formulées par l’employeur et fournir les éléments qui vous sont demandés (diplômes, etc.), c’est toutefois à la condition qu’elles aient un lien direct et nécessaire avec l’emploi proposé (5). A défaut, vous êtes en droit de vous taire.

Vous n’êtes par exemple pas tenu de révéler votre état de grossesse (6), vos antécédents judiciaires ou une condamnation pénale (dès lors que vous n’avez pas l’obligation d’en faire mention compte tenu du poste visé), votre état de santé ou votre handicap ou encore votre âge.

Information des candidats sur les méthodes de recrutement

En amont, le comité social et économique (CSE) de l’entreprise doit se voir communiquer les méthodes de recrutement qui seront utilisées. L’employeur doit alors communiquer ces dernières aux candidats, conformément à l’article L.1221-8 du Code du travail.

 L’employeur doit informer les candidats du caractère obligatoire ou non des réponses à un questionnaire, ainsi que les conséquences d’une non-réponse.

La CNIL demande aux entreprises de prévenir les candidats aux procédures de recrutement de la possibilité de consulter les résultats obtenus dont ils disposent. Les données sont confidentielles, elles sont alors conservées 2 ans avant d’être détruites, information qui doit également être communiquée aux candidats.

Le principe de non-discrimination appliqué au recrutement :

La discrimination directe 

Constitue une discrimination directe : la mesure volontairement discriminatoire en ce qu’elle ne masque pas son caractère de différenciation entre les candidats à un processus de recrutement au nom d’un motif discriminatoire visé aux articles L.1132-1 et L.1132-3-3 et 4 du Code du travail.

On y retrouve : l’âge, le sexe, l’état de santé, les origines, les mœurs, le lieu de résidence, la situation familiale, d’un état de grossesse, l’apparence physique, d’une particulière vulnérabilité résultant d’une situation économique, de son nom, de son orientation sexuelle, de son identité de genre ; les opinions politiques ou religieuses ; les activités syndicales ou mutualistes…

Sauf cas particuliers (professions des arts et du spectacle, mannequins, modèles), un employeur ne peut pas mentionner dans une offre d’emploi le sexe du candidat recherché.

Dans les entreprises d’au moins 300 salariés et dans toute entreprise spécialisée dans le recrutement, les employés chargés des missions de recrutement reçoivent une formation à la non-discrimination à l’embauche au moins tous les 5 ans (7).

La discrimination indirecte

Constitue une discrimination indirecte la mesure d’apparence neutre mais qui en fait à des conséquences de nature à désavantager un groupe de personne par rapport à d’autre.

A moins que cette pratique puisse être objectivement justifiée par un but légitime et que les moyens pour le réaliser ne soient nécessaires et appropriés, la discrimination indirecte est prohibée.

Néanmoins, lorsque la pratique ou la disposition répond à un but légitime et que les moyens utilisés pour l’atteindre sont nécessaires et proportionnés, alors la différence de traitement est admise.

Ainsi, ne constituent pas une discrimination interdite :

  • Les différences de traitement fondées sur l’âge, quand elles sont objectivement et raisonnablement justifiées par un but légitime ( favoriser l’insertion professionnelle ou assurer l’emploi de certaines catégories de personnes),
  • Les mesures prises en faveur des personnes vulnérables en raison de leur situation économique et visant à favoriser l’égalité de traitement.

La  charge de la preuve en matière de discrimination

L’employeur n’a donc pas le droit d’écarter d’un recrutement ou de l’accès à un stage ou une formation un candidat en se basant sur un des motifs énoncés ci-dessus (8).

En cas de litige, la charge de la preuve de la discrimination est allégée, partagée entre le demandeur et le défendeur :

Le candidat à un recrutement (à un stage ou à une période de formation en entreprise) présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte ;

C’est alors à l’employeur qu’il incombe de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Exemple : a été considéré comme une discrimination à raison de l’origine le fait pour un employeur de demander, notamment lors de l'engagement, à un salarié de changer son prénom de Mohamed pour celui de Laurent.

La protection offerte par la loi lorsque l’on témoigne contre des faits de discriminations :

Aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire pour avoir témoigné des agissements définis à l’article L.1132-1 du Code du travail ou pour les avoir relaté.

Il existe une limite à la protection accordée, qui est celle de la bonne foi de la personne qui témoigne. Ainsi, il ne faut pas que celle-ci rapporte des éléments de faits dont elle connaît la fausseté (Cass. Soc. 13 janvier 2021, n°19-21138).

Conformément aux articles L.1152-2 et L.1152-3 du Code du travail, la rupture du contrat en représailles est nulle.

Que faire si l’on est victime de discrimination pendant un processus de recrutement ?

Vous avez la possibilité d’exercer un recours civil devant le Conseil de prud’hommes.

Une organisation syndicale représentative peut également agir devant le tribunal judiciaire au moyen d''une action de groupe (L.1134-7 C.trav.)

Le but sera ici d’établir que « plusieurs candidats à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou plusieurs salariés font l'objet d'une discrimination, directe ou indirecte, fondée sur un même motif figurant parmi ceux mentionnés à l'article L. 1132-1 et imputable à un même employeur ».

Une association intervenant dans la lutte contre la discrimination ou dans le domaine du handicap, si elle est déclarée depuis au moins 5 ans, peut agir de la même manière.

Une proposition de loi encore à l'examen vise à unifier le cadre qui s'applique à toutes les actions de groupes, à élargir la qualité à agir, le champ matériel d'application, ainsi que les préjudices indemnisables. Une sanction civile serait envisagée en plus, si les dommages sériels sont intentionnels. Enfin, la proposition prévoit de créer des tribunaux judiciaires spécialisés pour concentrer les contentieux en matière d'action de groupe. 

Vous pouvez également déposer une plainte auprès du Procureur de la République, Commissaire, etc.

Vous pouvez également vous rapprocher des interlocuteurs suivants :

  • Le défenseur des droits, institution indépendante de l’état dont la mission est notamment la lutte contre les discriminations et pour la promotion de l’égalité (voir le site www.defenseurdesdroits.fr),
  • Les agents de contrôles de l’inspection du travail,
  • Les organisations syndicales,
  • Les membres du CSE.

 

 

(1) Art. L.4153-1 du C.trav.

(2) Art. D.4153-15 et s. du C.trav.

(3) Art. L.1133-3 du C.trav

(4) Art. L.8251-1 du C.trav.

(5) Art. L.1221-6 du C.trav.

(6) Art. L.1225-2 du C.trav.

(7) Art. L.1131-2 du C. trav.

(8) Art. 1132-1 du C. trav.